Un test a été organisé hier au Château d’Amboise pour vérifier quel serait l’impact visuel des éoliennes.
© (Photo NR, Julien Pruvost)
Eoliennes: sortez les jumelles!
La simulation sur l’impact visuel du projet Oratorio s’est tenue vendredi. Depuis Amboise, l’oeil nu n’était pas suffisant pour voir les ballons figurant une éolienne. Verdict du préfet d’ici quelques semaines.
Sur la terrasse du porc-épic du château d’Amboise, Frédéric de Laurens, président de la Fondation Saint-Louis, scrute l’horizon avec ses jumelles tandis que le préfet Patrice Latron s’exprime devant la presse. © (Photo NR, Julien Pruvost
Tout se résume à une histoire de point de vue. A l’issue de la très attendue simulation sur l’impact visuel du projet éolien d’Auzouer-en-Touraine, tout le monde est reparti plus ou moins content du château Royal d’Amboise. Les opposants à Oratorio sont rassurés: avec des jumelles, ils ont pu distinguer les deux ballons censés figurer une éolienne. Les défenseurs du projet aussi sont rassurés: il fallait des jumelles pour distinguer les mêmes ballons. Le paradoxe vivra tant que le préfet Patrice Latron, à l’initiative du rendez-vous de vendredi 12 janvier 2024, n’aura pas rendu son verdict. Sa décision est attendue en février, après remise du rapport d’expertise.
Le préfet « rassuré pour le patrimoine mondial »
D’ici là, tout restera matière à interprétation, et les deux camps devraient rester sur leurs positions. Une chose est sûre, néanmoins: pour les « pour » comme les « contre », le choses se sont déroulées en deux temps vendredi matin. Impossible, d’abord, de distinguer à l’oeil nu les deux ballons qui avaient été montés depuis Ayuzouer-en-Touraine à 142 m et 87 m, hauteurs du bout des pales et du moteur des éoliennes. Ce n’est qu’avec des jumelles – ou un zoom puissant d’appareil photo – que l’on a pu, ensuite , apercevoir les éléments en scrutant l’horizon, au-dessus de la ligne de crête de la forêt, à 15 km de là.
« Pour l’instant, moi, je ne vois rien », a d’abord déclaré le préfet. Puis un membre de l’Association de défense de l’environnement de la Gâtine tourangelle (ADEGT), en première ligne contre Oratorio, a distingué les ballons grâce à ses jumelles. Patrice Latron s’est donc équipé à son tour, et a discerné les ballons, dont le plus gros mesurait 12 mètres de long sur deux mètres de diamètre.
Avec une paire de jumelles, le préfet d’Indre et Loire, Patrice Latron, a pu distinguer les ballons.© (Photo NR, Julien Pruvost)
« Il faut une paire de jumelles pour les voir », a alors complété le préfet, avant de préciser: « je suis rassuré pour les visiteurs du château royal et pour le patrimoine mondial de l’Unesco. » Une manière de dire que la simulation permettait de son point de vue, de lever les dernières interrogations? Pour la société Innergex, porteuse du projet, le doute n’est plus permis. « le bilan est très positif. On ne voit rien à l’oeil nu. Il y avait des craintes, qui étaient légitimes. On y a répondu. Maintenant, on espère qu’on va pouvoir avancer sereinement », se réjouissait Guillaume Jumel, directeur général d’Innergex.
Et « l’effet stroboscope »?
Même satisfaction dans le camp d’en face. « La preuve est apportée: Même s’il faut des jumelles, confiait Jacques Gaudet, président de l’ADEGT. Par temps clair, il n’y a pas besoin de jumelles, il y a des moments où on les voyait sans ».
Paramètre essentiel de la simulation, la météo était, il est vrai, loin d’être optimale vendredi matin. Annoncé bleu, le ciel s’est finalement voilé de quelques nuages. Rendant le conditions peu concluantes pour la Fondation Saint-Louis, propriétaire du château Royal. « L’expertise du 12 janvier ne présente pas les conditions réelles de fonctionnement et de visibilité des éoliennes », a réagi la fondation, défavorable à Oratorio, dans un communiqué de presse à l’issue du test.
Autre argument avancé par les opposants: la simulation de vendredi n’a pas permis de mesurer l’impact des flashs lumineux qu’enverraient les éoliennes « toutes les trois secondes » et qui seraient particulièrement visibles la nuit. Cet « effet stroboscope » trouvera-t-il un écho aux yeux de Patrice Latron? S’il a jugé que les conditions n’étaient « pas idéales », le préfet les a néanmoins trouvées « bonnes ». Et estimé que le test ét&it un succès. « Je suis satisfait du déroulement. Tout le monde est d’accord sur le fait que nous avons étudié la question de manière objective ».
Julien Proult.
… Deux ballons de test à Auzouer
Des ballons simulant des pylônes d’éoliennes ont été lâchés dans le ciel d’Auzouer-en-Touraine, vendredi 12 janvier 2024 au matin. À Amboise, le préfet et des élus les ont observés depuis le château royal.
Le ciel est gris, l’air est froid du côté d’Auzouer-en-Touraine, ce vendredi 12 janvier 2024. C’est sur cette petite commune située au nord de l’Indre-et-Loire qu’un test grandeur nature se déroule depuis le début de la matinée.
À l’endroit où est prévue l’implantation de quatre éoliennes du projet Oratorio, les équipes de l’entreprise Phodia ont monté deux « ballons captifs » à la verticale.
À Auzouer-en-Touraine, vendredi 12 janvier 2024, le test grandeur nature se prépare.
© (Photo cor. NR, Jean-Marie Robin)
Un des deux ballons a été monté à hauteur du haut de la pale de l’éolienne, soit 142 m. Le deuxième s’est élevé à hauteur de la nacelle de l’éolienne, quelques dizaines de mètres plus bas.
Un huissier mandaté par les opposants
Deux huissiers ont participé à cette expertise : le premier a été mandaté par l’État, le second par les associations d’opposants aux éoliennes.
Le vent matinal a donné quelques sueurs froides aux équipes chargées de ce test grandeur nature. À 10 h 30, les deux ballons étaient finalement dans le ciel.
Les deux ballons, retenus à l’aide de cordes fixées au sol, seront redescendus à la fin de la simulation.
© (Photo cor. NR, Jean-Marie Robin)
Stéphane Bern ne viendra pas
Pour rappel, cette simulation a été demandée par Patrice Latron, préfet d’Indre-et-Loire, en octobre 2023, face à la contestation des opposants au projet.
En octobre dernier, ils avaient reçu un soutien de taille : celui du médiatique Stéphane Bern. L’animateur est un farouche opposant aux éoliennes, au nom de la défense du patrimoine.
Le présentateur, qui avait prévu d’assister à l’expertise, ce vendredi 12 janvier 2024, sur les terrasses du château royal à Amboise, n’a finalement pas eu la possibilité de se rendre en Touraine, a-t-on appris en milieu de matinée.
De son côté, le préfet d’Indre-et-Loire Patrice Latron est arrivé vers 11 h au château d’Amboise pour observer la simulation aux côtés d’élus, des représentants de la Fondation Saint-Louis et des associations d’opposants.
Il a d’abord présenté les enjeux du projet Oratorio en s’appuyant sur une carte d’Amboise et ses alentours :
Réponse en février
Patrice Latron s’est ensuite rendu sur les terrasses du château d’Amboise, pour observer l’horizon en direction d’Auzouer-en-Touraine. A-t-il aperçu les ballons ? « Pour l’instant, moi, je ne vois rien », a indiqué publiquement le préfet.
À l’œil nu, les ballons lancés à Auzouer-en-Touraine ne sont pas visibles depuis le château d’Amboise.
© (Photo NR, Julien Pruvost)
Quelques minutes plus tard, il s’est équipé de jumelles pour scruter le ciel et a confirmé voir les deux ballons. Patrice Latron s’est dit « rassuré » pour le classement au patrimoine de l’Unesco.
Avec une paire de jumelles, le préfet d’Indre et Loire, Patrice Latron, a pu distinguer les ballons.© (Photo NR, Julien Pruvost)
Mais pas question de rendre une décision définitive ce matin. Le préfet rendra son avis courant février, après la remise du rapport d’expertise.
Pascaline Mesnage, Julien Proult et cor. NR : Jean-Marie Robin
Une expertise payée par Innergex
L’expertise réalisée vendredi 12 janvier 2024 a été demandée par le préfet Patrice Latron en octobre 2023. Le cahier des charges a été défini par la préfecture mais c’est à l’entreprise Innergex, porteuse du projet Oratorio, qu’il est revenu de l’organiser et de la payer, et ce même si ce sont les opposants qui ont poussé pour obtenir cette simulation. Chez Innergex, on parle d’un coût entre 5.000 et 10.000 €. La réalisation du test a été déléguée à l’entreprise Phodia.